Victoire en demi-teinte pour Google : la CJUE déclare inapplicable la loi allemande relative aux droits d’auteurs

La loi allemande ayant consacré dès 2013 un droit voisin pour les éditeurs de presse est déclarée inapplicable par la Cour de justice de l’Union européenne, faute de notification préalable à la Commission européenne, conformément aux prescriptions de la directive 98/34/CE (CJUE 12 sept. 2019, VG Média c/ Google LLC, aff. C-299/17).

La création d’un droit voisin spécifique pour les éditeurs de presse pour l’utilisation de leurs publications par les services de communication au public en ligne, a pris forme avec la loi allemande entrée en vigueur le 1er août 2013.

Ainsi, bien avant la France, premier pays à avoir transposé l’article 15 de la directive (UE) 2019/790 du 17 avril dernier (Loi n° 2019-775 du 24 juill. 2019, JO 26 juill. 2019), l’Allemagne a reconnu à l’éditeur de presse « le droit exclusif de mettre à la disposition du public, en tout ou partie, le produit de la presse à des fins commerciales, sauf s’il s’agit de mots isolés ou de très courts extraits de texte ». Cette mise à disposition est licite, pour autant « qu’elle n’est pas effectuée par des prestataires commerciaux de moteurs de recherche ou des prestataires commerciaux de services qui éditent de manière analogue des contenus ».

Un litige est survenu entre Google et VG Média, société allemande de gestion de droits d’auteur, qui considérait que le géant américain avait violé les droits voisins de plusieurs de ses adhérents, éditeurs de presse. Elle soutenait que Google utilisait sur son moteur de recherche, ainsi que sur son site Google Actualités, pour l’affichage de résultats de recherches et de sommaires d’actualités, des « snippets » (courts extraits ou résumés d’articles, selon les cas, accompagnés d’images), sans avoir versé de rémunération en contrepartie.

Le tribunal berlinois saisi du recours en indemnités a cherché à savoir si les dispositions de la loi allemande auraient dû être communiquées à la Commission européenne au stade du projet, en application de l’article 8, paragraphe 1, alinéa 1, de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998 (Texte qui prévoit une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information, applicable en l’espèce).

La question posée à la CJUE a son importance puisque conformément à la jurisprudence de la Cour, les dispositions adoptées en violation de l’obligation de notification sont inapplicables et ne peuvent, dès lors, être opposées aux particuliers (CJUE 27 oct. 2016, James Elliott Construction, aff. C-613/14). Dans la mesure où la réglementation objet du litige vise spécifiquement les services de la société de l’information, le projet d’une telle règle technique devait donc faire l’objet d’une notification préalable à la Commission, juge la Cour. À défaut, la règle est déclarée inapplicable et ne peut être invoquée dans un litige entre particuliers.

Toutefois, cette décision constitue une relative victoire pour Google et autres utilisateurs de contenus de presse en ligne, l’Allemagne étant tenue de transposer avant le 7 juin 2021 la directive (UE) 2019/790.

(GB- Avocat Paris)